Les Mystères Douloureux

Les Mystères Joyeux conduisent vers le Dieu inconnaissable par la pratique des vertus et l’acquisition de la Sagesse qui purifie le cœur de tout homme sincère.

Nul ne va au Père s’il ne passe par le Fils qui seul Le connait en toute plénitude de vérité. Jésus, par son incarnation devient l’Icône accessible de la Divinité qui par sa Croix nous réconcilie avec le Créateur dans un sacrifice d’amour inaugurant l’émergence du Royaume de Dieu, son Église, son Épouse dont la Toute Pure Marie est la Reine-Mère.

La Parole de Vérité de Celui qui vient dans le nom du Seigneur (in nomine domini) est un feu purificateur : « Je suis venu apporter le Feu sur la terre ». Ce feu va consumer entièrement son humanité jusqu’à la mort conduisant tout homme qui marche à sa suite à la plénitude de la vie de l’Esprit dont les fruits se mesurent dans les Mystères Glorieux. Mais attention, la souffrance du Calvaire n’est pas que le signe de l’Amour de Dieu pour ses enfants et ses frères, elle est surtout l’acte d’Amour douloureux porteur de la Grâce offerte à tout homme livré à l’égarement du péché depuis Adam. L’Amour de Jésus transforme la Justice de Dieu en Miséricorde pour celui qui confessant son Nom, observe ses commandements. Le désordre entré dans le monde par le péché se consume dans un nouvel ordre qui rétablit l’harmonie du Royaume de Dieu dès ici-bas.

L’Amour-charité qui se donne vraiment la vie en plénitude. Le prix fait peur mais la foi, soutenue par la Grâce, conduit à la victoire l’athlète de Dieu rempli d’amour, qui sacrifie son ego, sa chair, pour vivre par l’Esprit. « Beaucoup sont appelés mais peu sont élus », celle phrase du Saint Évangile nous prévient de la difficulté de ce chemin.

« Que celui qui veut me suivre se renonce, qu’il prenne sa croix » : c’est ce qu’ont fait les Saints de l’Histoire, ils ont souvent renoncé à l’esclavage désordonné du plaisir mais ont connu par là dès ici-bas, d’immenses joies engendrées par la liberté que procure l’harmonie de l’Amour. Cet Amour est rendu possible par la Grâce du Fils qui vit en eux, dans leur cœur : « Le Royaume est au-dedans de vous ».

Retiré dans une grotte, la Lumière du Monde a la vision de tous les péchés des hommes, ses frères, depuis notre Père Adam jusqu’au dernier individu de notre race. Pris d’une gigantesque compassion, il voit aussi toutes les souffrances qui surgiront dans l’histoire, de tous les désordres engendrés par les crimes humains. Il voit aussi le prix à payer pour Lui et ses disciples, du rétablissement de l’harmonie qui Le et les conduira sur le chemin du Calvaire. Sa Divinité qui voit tout se retire alors dans le sein de la Sainte-Trinité (cf. Catherine Emmerich) et Jésus se retrouve dans sa solitude d’homme qui va être livré au mal : tremblant d’angoisse et de peur, il transpire sang et eau et réveille ses disciples et amis qui dorment : « Veillez et priez car l’Esprit est fort, mais la chair est faible ».

Par Marie, nous sommes appelés à nous réveiller et à prier, à contempler nous aussi la multitude des péchés et des souffrances de l’humanité. Comme les Saints Apôtres, nous sommes invités à partager cette angoisse amoureuse du Christ, à prendre conscience de son Amour pour chacun de nous, à mesurer le Mystère du Salut qui nous concerne, pour coopérer par la puissance de vie du Sauveur, à la construction de Son Corps Mystique : « Avec Lui, en Lui et par Lui ». Sans cette compassion pour Jésus et nos frères, nous ne saurions porter des fruits véritables.

La Sagesse a bâti sa maison, elle a dressé ses sept ¹ colonnes. Dans les Mystères Joyeux, nous avons découvert quatre de ces colonnes : humilité, amour du prochain, détachement des biens de ce monde et purification du cœur pour « voir » Dieu.

Pour que la Sagesse soit complète, il faut encore franchir trois portes à l’invitation de Jésus, sans lesquelles une rencontre avec Lui demeure stérile : « Heureux l’homme pour lequel je ne serai pas une occasion de chute ».

Heureux celui qui revêtu de la Lumière du Christ la conserve et la répond dans le monde : par la Grâce sanctifiante le faible, le pauvre, le perdu deviennent forts, riches, et réconfortés au bercail. Pour trouver la Source de Vie, il faut retourner la barque, remonter le courant du fleuve et ramer pour se vaincre et devenir saints comme notre Père du Ciel est Saint.

 ¹ Dans les parties historiques des Écritures, on trouve souvent le chiffre 7 pour évoquer l’état de ce qui est complet ou le fait de mener une action à terme. Les Israélites démontrèrent une foi et une obéissance entières quand ils marchèrent pendant 7 jours autour de Jéricho et en firent 7 fois le tour le 7ème jour, après quoi les murailles s’écroulèrent (Josué VI, 2-4, 15). [International Bible Students Association, Étude perspicace des Écritures, Vol. 2, P. 416]

Jésus souffre l’horrible supplice de la flagellation pour que nous puissions vaincre en nous l’esclavage où peuvent tomber les sens quand ils conduisent loin de Dieu.

Pour que nos yeux se détournent de ce qu’il ne faut pas voir afin de voir ce que Dieu veut nous montrer « Afin que les aveugles voient ». Afin que nos oreilles se détournent de ce qu’il ne faut pas écouter pour entendre ce que Dieu veut nous donner à entendre. De même pour que notre bouche ne devienne ni gourmande ni ivrogne ni droguée mais libérée pour le service de la Parole. Que nos pieds n’aillent pas où ils ne doivent pas aller et nos mains ne touchent pas ce qui ne convient pas et qui peut nous rendre esclave.

Par notre libération, nos prières et nos efforts, comme Marie et tous les Saints « qui soutiennent le monde » (cf. Silouane), nous devons demander et obtenir la libération de tous les esclaves de la sensualité pour coopérer à l’œuvre salvatrice du Christ.

Jésus, le Roi par excellence du Ciel et de la Terre, reçoit une couronne d’épines sur la tête pour nous libérer de l’esclavage de notre tête. L’orgueil, les mauvaises pensées, les mauvaises images entretenues dans notre mémoire, les mauvais plans : Jésus veut que nous remettions notre tête à l’endroit, que nous pratiquions l’ascèse des pensées (en grec Hésychia) par un travail d’ascèse qui brûle en nous le vieil homme et nous donne Sa Grâce un esprit lumineux qui se purifie.

Nous devons aussi demander par nos prières, nos efforts et ceux des Saints du monde visible et invisible, que le Seigneur libère tous les emprisonnées de la tête en se servant de Ses Mérites qui ajouté aux nôtres, réalisent la Communion des Saints dans Son Église.

Avec Jésus, nous sauvons le monde car Il se sert des trésors mystiques amassés pour disposer sa Miséricorde partout dans ce monde. C’est pour cela que Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, dans son couvent de Lisieux, est appelée Patronne des Missions et qu’elle « passe son ciel à faire du bien sur la terre ».

La Pierre rejetée par les bâtisseurs devient la Pierre d’angle pour le Salut du monde en chacun de nous et avec Jésus nous recréons le monde libéré du mal. On comprend mieux pourquoi certaines « Âmes victimes » d’amour comme Marthe Robin ou le Saint Padre Pio, durant toute leur vie terrestre s’anéantirent avec le Crucifié pour que le monde puisse recevoir la Grâce en abondance.

L’Esprit en eux manifeste ses fruits invisibles dans des fruits visibles défiant jusqu’aux lois de la nature qui se suspendent en signes merveilleux révélant la Vérité de la Croix.

Dans cette 7ème et dernière porte, Jésus se charge du lourd fardeau de la croix pour nous aider, chacun de nous et toute l’humanité, à vaincre la faiblesse de la volonté. Nous savons souvent où est le bien et le bon, mais nous sommes incapables de le faire comme nous le dit Saint-Paul.

Par Grâce, pour nous fortifier, Jésus souffre pour nous donner sa force. Il tombe et retombe car il sait notre faiblesse. Il veut nous secourir par sa Grâce qu’il communique au monde de ceux qui L’aiment et qui Le cherchent. Marie, la Toute Pure, nous invite à la rencontre de son Fils et vit intensément ses souffrances épousant l’Amour et les Mérites de son Fils.

Se libérer de l’esclavage de la sensualité, de la mauvaise pensée et de la volonté défaillante, c’est pénétrer pleinement dans le message de Jésus, Roi, Prêtre, Prophète, qui conduit l’homme déchu vers la Vie divine en germe dès ici bas en sachant que le chemin est rude qui conduit au Seigneur.

Jésus élevé sur le bois de la Croix accomplit un réel sacrifice d’amour tel que Dieu notre Père mue la Loi de Justice en Loi de Miséricorde, octroyant la Grâce à tous ceux qui se laissent toucher par son infinie compassion. Le Bon Larron par son repentir connait le jour-même les joies du Paradis, le Mauvais Larron refuse l’appel de Celui qui pourtant attire à lui toute la création. La séparation sacrificielle du corps et du sang précieux du Sauveur que nous renouvelons à la Messe, de manière non sanglante mais bien réelle (car elle nous renvoie mystiquement à l’instant du Golgotha) nous octroie la grâce de force qui nous libère de la pesanteur de la chair humaine et divine. Il nous ouvre le droit au Ciel en nous donnant les moyens actifs d’y parvenir par son amoureuse Providence. Le Crucifié immobilisé par la croix nous libère et de cette apparente faiblesse peut naître notre force.

Le voile du Temple de Jérusalem et l’homme séparé de la présence de Dieu depuis le péché d’Adam la retrouve dans le Christ présent dans les tabernacles de la terre, icône du Père et son messager Messie-Sauveur. En souvenir de ce signe, le voile devant le tabernacle (conopée) doit être partagé en deux.

Au-delà de l’aspect primordial et sacrificiel, Jésus proclame par sa Mort d’Agneau sans tâche, la fin du cercle victimaire qui sévissait depuis Abel et Caïn : « Bénissez ceux qui vous maudissent » « Aimez vos ennemis ». La loi du Talion « Œil pour œil, dent pour dent », loi de justice de l’Ancien Testament, devient Loi de Miséricorde et d’Amour. « La colère des hommes n’accomplit pas la Justice de Dieu », dit Saint-Paul : le mal dans le monde peut être enrayé et peut commencer à émerger réellement dès ici-bas le Royaume de Dieu illuminé par l’Esprit-Saint qui procure les fruits de sainteté chez ceux qui trouvent les portes de la Sagesse dont nous avons parlé. Nous verrons dans la troisième partie les fruits promis par Jésus à son Église.

La pierre angulaire du nouveau Temple a été rejetée et sert de pierre d’angle à un Temple nouveau dont le Christ est le prototype, celui qui n’est pas bâti de main d’homme : le temple intérieur.

L’Ancien Testament nous dit que le « sang est l’âme de la vie », cette vie divine nous est donnée par le Christ dans son précieux Sang. L’Âme de Jésus par sa chair vient en notre chair, habiter notre âme et la purifier pour nous ouvrir le Paradis et les délices de l’Esprit Saint.

« Je suis le Chemin (vers le Père), la Vérité (du Fils) et la Vie (de l’Esprit) ».

«Nul ne connaît vraiment le Père sans le fils et nul ne peut être sauvé sinon dans le Sang du Fils et l’Eau de l’Esprit-Saint ».

Donc la Sagesse se présente comme un chemin vers le Père (Mystères Joyeux), la Sagesse est aussi présente absolument dans le Fils comme Vérité (Mystères Douloureux) ; nous allons voir que la Sagesse produit dans le Saint-Esprit la Vie en abondance dans les Mystères Glorieux par une procession des deux précédents.

Entrons dans cette Vie de l’Esprit par les Mystères Glorieux où Marie nous conduit…